dimanche 5 mai 2013

J8, 1 mai 2013, 16h00. Du paradis à l'enfer.


Vent: Sud force 6-7 ;  Cap: 265° ; Vit.: 5,5 nds ; Allure: près 2 riz

"Ca m'apprendra à crier mon bonheur sur les toits. Et pourtant combien de fois j'ai appris à mes dépens que quand on est heureux et que tout va bien, on se la ferme!"

Ce matin réveil à 7H00, je regarde le GPS, cap 240°, vitesse 6,5 nœuds, super! Je me fais mon petit café comme d'hab et je sors le boire dehors. Anémomètre 15-20 nœuds, la mer a grossi depuis hier. Elle commence même à moutonner...C'est con mais mon baromètre ne marche plus, donc je ne peux pas voir si la pression atmosphérique chute... Et puis la météo n'a rien annoncé d'inquiétant.

Je bois mon café et me dis que le bateau se comporte bien, il avance bien, ce n’est pas la peine de prendre un ris. Donc, je descends comme à mon habitude me préparer le petit déj, puis je m'assois dans le carré pour écrire. Dans le cockpit, on recevait quand même quelques embruns. Une heure plus tard, de l'intérieur, je remarque que Yapa force tout de même un peu sur son gréement, l’allure est de moins en moins confortable... Et puis, je vois à travers le hublot, de plus en plus de vagues déferler sur le pont. La mer a encore grossi en une heure, 3,5 mètres de houle et 25 nœuds de vent à l'anémomètre, donc en déduisant ma vitesse, 20 nœuds de vent réel à tout casser. Il faut dire que par vent arrière ça seraient des conditions idéales, mais contre le vent et les vagues, ça devient vite fatiguant!

Alors, je décide de prendre 1 ou 2 ris et d’enrouler au tiers le génois. Et voilà que l'enrouleur de génois se bloque! Ça m'était déjà arrivé 2 ou 3 fois depuis que je suis parti, je ne l'ai pas mentionné car à chaque fois j'ai pu régler le problème en quelques minutes. Donc, je vais à l'avant du bateau, armé de ma pince et d'un tournevis afin de débloquer le système. Rien à faire, avec la force du vent, et l'eau, les tours sont trop serrés et entremêlés. Bon, je sais que le vent ne va pas augmenter, le ciel est clair et dans cette région, à cette saison, les vents ne montent jamais à plus de 25 nœuds. Et ce n’est pas 25 nœuds qui vont faire peur à YAPA! Alors je décide de garder le cap et d'aller à l'avant pour défaire manuellement les 20 tours de l'enrouleur pour ensuite les refaire soigneusement...

Pendant une heure, je me suis reçu paquet sur paquet de vagues, me cramponnant comme je pouvais tout en défaisant et refaisant les 20 tours d'enrouleur! C'est vrai que j'aurais pu prendre une allure plus confortable pour faire ce boulot... Puis après avoir enroulé un tiers du génois et pris deux ris dans la grande voile, trempé de la tête aux pieds, exténué mais heureux du travail bien accompli, je me prélasse dans le cockpit, et savoure d'un plaisir masochiste le picotement de tous mes muscles endoloris!

Je décide de me récompenser avec des œufs au bacon, et en descendant qu’est-ce que je vois? Le bateau étant à la gite, je vois de l'eau huileuse sortir de mes fonds de cale! AHHHH!
À chaque fois, que je pousse mon bateau trop fort au près dans une grosse mer, en le faisant fortement tanguer, l'eau et l'huile qui étaient restées dans mes tuyaux d'évacuation de précédents pompage se déverse dans mes fonds de cale! J'ai bien voulu installer une valve de non-retour mais il est spécifié dans le manuel qu'avec ma pompe c'est fortement déconseillé! À chaque fois je me fais avoir! Ce n'est pas beaucoup d'eau, une dizaine de litres à tout cassé. Et me voilà à genoux pendant une heure à nettoyer tous mes fonds de cale, je précise, dans un bateau fortement à la gite...

Bref, je pensais que j'allais déprimer et puis non, je me surprends en train de sourire, heureux d'en baver....
Après tout, "le paradis ça se mérite!". Je dois vraiment être maso!
Mais je crois qu'il faut l'être un peu quand même pour prendre un petit bateau à voile et vouloir traverser les océans! En tout cas, il ne faut pas avoir peur d'en ch--r!

Je pensais être exténué après toutes ces émotions! Eh bien non! J’ai faim, une faim de loup! Alors je me prépare des pommes de terre sautées avec du chorizo!

Un Délice! 



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