Je suis ancré dans l’anse d’Atuona, juste derrière la digue, là où ça remue le moins. Théoriquement c’est interdit afin de laisser le passage au bateau de ravitaillement qui vient deux fois par mois de Papeete. Mais comme il est reparti il y a deux jours, on m’a dit que je pouvais rester là une dizaine de jour sans me préoccuper de l’interdit.
Premier
bon point! J’aime cet esprit flexible où l’on peut déroger à un interdit si ça
ne porte pas préjudice.
J’ai
pu faire le tour du bateau en annexe avant de mettre pied à terre;
effectivement, il y a une forêt d’anatifes sur toute la coque!
Je
comprends maintenant que ma vitesse ait pu autant diminuer. C’est quand même
dingue qu’ils aient pu proliférer à ce point en l’espace d’un mois!
Bref,
le carénage sera pour plus tard…
Le
village d’Atuona est à une demi-heure de marche. C’est quand même bon de
marcher sur la terre ferme! Moi qui pensais avoir le mal de terre après ces
semaines passées en mer… rien du tout, aucun flageolement des jambes, aucune
perte de l’équilibre, absolument rien. C’est marrant, lorsque je vivais sur mon
bateau au mouillage et que je travaillais à Bandol, il m’était arrivé plusieurs
fois, après seulement une nuit houleuse, d’avoir le mal de terre en posant le
pied à quai. Parfois c’était tellement intense que je me cramponnais des deux
mains à ma table de travail pour ne pas tomber devant le regard amusé de mes
collègues.
On dit
qu’aux Marquises on ne trouve pas de fruits au marché car tous les arbres
regorgent de fruits et qu’il suffit de se pencher pour en récolter. C’est vrai,
au bord de la route poussent des manguiers, des bananiers, des grenadiers, des
tamariniers, des goyaviers…et bien d’autres encore dont je ne connais pas le
nom. Il ya des fleurs de toutes les couleurs et des senteurs qui m’enivrent.
Devant une telle exubérance de la nature, j’en ai la tête qui tourne. Mon sens
olfactif qui depuis des semaines ne sent que l’iode ne sait plus où donner du
nez!
Tous
les papiers d’entrée dans le territoire se font à la gendarmerie.
Super
simple, il n’y a qu’une feuille à remplir avec les données du bateau et des
membres d’équipages et voilà, tampon sur le passeport et bienvenu aux
Marquises!
Ici
tout le monde tutoie tout le monde, même dans l’administration et tout ça dans
un français au doux accent chantant dont chaque phrase semble se terminer par
des pointillés.
J’adore!
Sinon,
fidèle à moi-même, bien sûr la première chose que je fais en arrivant à terre
est d’acheter un pack de bières et un paquet de tabac à rouler! Et je sais très
bien que les six bières vont y passer ce soir! Hmmm! Je me réjouis d’avance,
voilà tellement longtemps que je n’aie pas bu d’alcool et que je n’aie pas fumé
de cigarettes…
Dans
deux jours Clarisse et Marwan arrivent par avion de Papeete.
Voilà
le temps qu’il me reste pour faire le linge, les courses, tout nettoyer,
briquer, afin de pouvoir leur souhaiter la bienvenue.
Qu’est-ce
que je suis heureux de bientôt retrouver mes petits amours!
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