lundi 15 août 2011

Du 01 juillet au 06 juillet 2011 : Notre première grande traversée avec petit moussaillon


01 juillet 2011: Enfin partis vers Panama, 13:04.36N 70:21.38W

Nous avons eu la chance de trouver une fenêtre météo pour partir vers Panama, ce qui en cette saison est rare. Les meilleures périodes sont les intersaisons : en avril-mai quand les alizés faiblissent, avant que la saison cyclonique ne commence, et en octobre- novembre, avant que les alizés ne forcissent. 

Tout le monde nous a mis en garde quant au passage du Cap Gallinas, réputé comme étant l’un des 5 caps les plus difficiles au monde. Alors nous avons attendu, jour après jour, prenant l`avis de vieux loups de mer. Nous comptions passer encore une bonne nuit de repos et partir seulement le vendredi matin de Spaansen Water, mais la météo du jour nous annonçant l`arrivée d`une onde tropicale dans les jours prochains, a semé la confusion dans nos esprits. Soit on laisse passer l`onde tropicale et on était plus du tout sûr de pouvoir partir cet été, ou on y va, maintenant, avant que cette onde tropicale ne nous tombe dessus. Et quand, « Seafari » (notre expert météo)  nous a dit, it shouldn’t  be too bad if you leave now, on a bouclé les préparatifs du bateau en une demi-heure (bâche pliée, rangée, hors-bord et  annexe sur le pont, loquets fermés, check-list départ OK, moteur en route) et on a levé l`ancre pour sortir de Spaansen Water avant la tombée de la nuit. C`était juste, juste. L`avantage est que cet empressement a évité à Clarisse de trop cogiter. Il est vrai qu`avec bébé à bord, on réfléchit à 10 fois avant de mettre les voiles.
En ce moment même, nous sommes à 80 miles du Cap, plein vent arrière avec une jolie brise, voiles en ciseaux, génois tangonné. On avance à 6 nœuds sur une mer relativement calme. Nous avons bon espoir de passer Punta Gallinas sans trop se faire bousculer.

02 juillet 2011, 21hUTC: Punta Gallinas est passé « the fingers in the nose », 12:32.71N 73:08.01W 

C`est avec une moyenne de 7.5 nœuds, 20 nœuds de vent et une mer peu formée (2,5 mètres de houle) que nous avons contourné Punta Gallinas , la terreur des plaisanciers des Caraïbes, « les doigts dans le nez »! Nous avons abandonné tangon et plein vent arrière, car on s`approchait trop de la fameuse ligne des 1000 mètres de profondeur. On a donc dû piquer beaucoup plus au large avant la tombée de la nuit, hier soir. Ça a rallongé notre route, mais comme disait un sage rencontré à Madère « Il vaut mieux perdre 5 minutes dans sa vie que sa vie dans 5 minutes ».


Seul danger maintenant, les orages électriques, qui en cette saison sont relativement fréquents. La nuit on voit souvent des éclairs au loin pourfendre le ciel. Ces phénomènes ne sont pas prévisibles et surviennent aussi bien sur les côtes qu`au large.
La vie à bord n`est pas des plus confortable, mais Clarisse commence à s`amariner. Il faut toujours 1 ou 2 jours de navigation pour ne plus ressentir les symptômes du mal de mer, et pouvoir mener une vie à peu près normale. Heureusement, on a eu un peu de temps pour préparer de la cuisine avant de partir, car cuisiner quand on est vaseux, et le bateau qui bouge dans tous les sens, ce n`est pas une sinécure. Marwan quant à lui n`a aucun symptômes du mal de mer. Il perturbe un peu nos quarts en se réveillant encore souvent la nuit, mais sinon, il supporte très bien, pour l`instant, la vie sur le bateau. Il s`occupe à jouer avec les ustensiles de cuisine, les outils de papa, … Mais pas tellement avec des jouets adaptés à des enfants de son âge. Il fait de l`exercice en grimpant partout où il peut, notamment la descente (escalier très raide qui mène dans le cockpit). Clarisse se fait déjà beaucoup de cheveux blancs … Quant à Hicham, avec un bateau qui avance à plus de 7 nœuds de moyenne, il est aux anges. 




 On doit avouer qu`on a abandonné les couches lavables, trop de boulot. Comment on fait ? On lave les couches jetables à l`eau de mer, on les fait sécher et on les stocke pour pouvoir les bruler dans les San Blas. On reste ainsi écolo, même si souvent l`envie de les jeter par-dessus bord nous titille.

Au moment où on vous écrit, Hicham a péché une superbe dorade coryphène de 8,5 kg, ce qui couronne cette belle journée de navigation.


Restent  382 miles jusqu`aux San Blas, soit à peu près, 4 jours de navigation. On devrait arrivera à temps pour récupérer Hind à l’aéroport de Porvenir.

Nuit du 2 au 3 juillet 2011 : 

Une onde tropicale est annoncée pour cette nuit au niveau du 73W sans que la latitude soit indiquée. Nous avons affalée la GV et avançons doucement à 4-5 nœuds sous génois seul, plein vent arrière. Pour l`instant, pas d`onde tropicale en vue, elle est peut-être plus au Nord. Par contre le ciel s`illumine en permanence  tout autour de nous d`éclairs, qui paraissent cependant encore très loin. C`est un spectacle jugé fascinant par Hicham, effrayant par Clarisse.

C’est incroyable, seuls quelques nuages épars flottent au-dessus de notre tête sous un ciel étoilé. Et pourtant tout autour de nous, le ciel s’illumine de flash sans qu’on perçoive ni un éclair, ni le bruit du tonnerre. La mer est calme, le vent faible et constant, le bateau stable, un silence peu habituel nous entoure alors que le ciel s’embrase de mille feux. C’est un spectacle extraordinaire. 








3 juillet 2011 :

Cette nuit a été des plus bizarres. Peut être était-ce un de ces fameux « orages électriques » (« Thumberstorms ») dont nous ont parlé « Seluna ». Etait-ce l`effet des éclairs, la nervosité de sa maman, Marwan nous a tenus en éveil de 4 à 6 heures du matin ! Impossible de le rendormir. Il voulait peut-être participer et prendre son quart.
Aujourd’hui, le vent a franchement baissé, on est au moteur. Clarisse a reçu la visite de dauphins ce matin, pendant son quart. L`eau est très claire et on pouvait les voir facilement jusqu`à 3 mètres de profondeur. Quel beau spectacle que ces dauphins jouant avec la proue du bateau !



On se traine, 4,5 nœuds au moteur. A cette allure, on arrivera à Porvenir dans 2 jours et 12 heures.

Restent 274 miles.
04 juillet 2011, 22hUTC: légère brise au paradis 11:03.01N 76:13.11W 

La nuit a été calme malgré les éclairs qui zèbrent le ciel. On s`y habitue. Du moment qu`on est pas dessous, c`est un spectacle fascinant. Une petite brise, en début de nuit nous a permis de sortir le génois et d`enfin arrêter le moteur. Ce matin, le vent a encore baissé, force 2 (4 à 6 nœuds). Hicham refuse de faire du moteur. C`est un bateau à voile, que diable ! Il sort le spi qui n`avait pas vu le jour depuis un an. Hicham n`a pas perdu la main. Le spi déroulé, fait avancer le bateau à 4 nœuds, et le stabilise. Ça a aussi  permis à Hicham de tester les nouvelles installations, notamment les 2 winchs supplémentaires.
Un groupe de dauphins viennent nous féliciter en sautant joyeusement devant le bateau.
Chacun trouve ses marques. Marwan a bien dormi et nous a permis de faire de vrais quarts de nuit. On a pu se reposer. Tout le monde a donc bien dormi et est de bonne humeur. On mange bien : dorade coryphène à toutes les sauces : en sashimi, ceviche, en papillotes, marinée dans de la moutarde et du miel, dorade au curry et lait de coco, au gingembre… On ne se lasse pas de ce poisson exquis dont on se nourrira pendant 4 jours ; il faut dire que c’était une grosse bête ! 

Comble du bonheur, Hicham installe un hamac à l`extérieur, dans le cockpit fixé en bout de bôme et au portique, pour nous, et le hamac de Marwan à l`intérieur, dans le carré, bien protégé de toute chute éventuelle. La mer pour nous, un temps clément, un bateau stable, une odeur de pain chaud et de la musique classique, que demander de plus ?




Cet après-midi, Clarisse et Marwan dorment à l’intérieur, alors que je me prélasse dans le cockpit. La mer est calme, on avance tout en douceur et je me laisse bercer par le clapotis de l’eau glissant le long de la coque. 

Puis,  j’entends des bruits de couverts qui s’entrechoquent, puis une casserole qui tombe dans l’évier… pourtant le bateau est extrêmement stable, c’est étonnant… Ça ne peut pas être Marwan ; d’habitude il chouine en se réveillant. Je descends quand même vérifier,  et c’est là que je surprends ce petit zigoto, qui m’accueille d’un grand sourire enchocolaté et  du chocolat plein les mains ! Il est content, il a repéré la casserole qui avait servi à faire fondre du chocolat pour le gâteau du gouter et bien sûr, en a mis partout ! Qu’est ce que je l’aime ce petit coquin !



Restent 180 miles.

05 juillet 2011, 23hUTC: J-1 10:16.50N 77:46.00W
 
Il y a très peu de vent. On est allé au bout du spi, et même au-delà, puisqu`il s`est enroulé autour de l`étai. Heureusement, Hicham, malgré son état semi-comateux (Clarisse a dû le réveiller en sursaut) a réussi à débrouiller rapidement la situation. On est au moteur depuis midi, on avance à 4.6 nœuds et on devrait arriver à cette vitesse, demain matin, dans l`après-midi. Il fait beau, le ciel est clair, la mer plate, mais il fait très chaud. On a installé une petite piscine pour Marwan dans le cockpit, pour l`occuper et le rafraichir. Hicham regarde des films. Clarisse occupe Marwan avec des jeux, des livres,… Ainsi passe le temps sur Yapa. 




Restent 81 miles.

06 juillet 2011, 23hUTC: Enfin arrivés à Kuna Yala ! 09:33.41N 78:56.92W
 
Enfin arrivés, après 6 jours de traversée. Nous avons ancré à 11h30 à Isla Porvenir à Kuna Yala (iles San Blas). Le temps était pluvieux, la visibilité mauvaise. On s`en est sorti grâce aux Way Points donnés par notre guide nautique et Maxsea qui pour une fois a des cartes exactes. Nous sommes tout prêt de la piste d`atterrissage où nous réceptionnerons Hind, la sœur d`Hicham demain. On ne peut rêver meilleur timing et franchement on ne pensait pas y arriver. On aurait très bien pu rester coincés à Curaçao tout l`été à cause du mauvais temps.